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Marie appelée la Magdaléenne (Marie, Marie-Madeleine)

Site historique consacré à Marie, surnommée "la Magdaléenne" (alias Marie de Magdala, alias Marie-Madeleine)

Marie-Madeleine enceinte dans la Basilique Saint Rémi de Reims

Marie-Madeleine enceinte dans la Basilique Saint Rémi de Reims ?

 

Voici encore une photographie véhiculée sur la toile par certains internautes convaincus que Marie-Madeleine et Jésus étaient mariés et qu’ils ont eu une descendance. De quoi s’agit-il exactement ? Cette magnifique sculpture de la Déploration du Christ (ou Lamentation) peut être admirée à la Basilique Saint Rémi de Reims. On lit dans l’Encyclopédie en ligne Wikipédia, à l’article “Déploration du Christ” : 

 “Le thème traité est celui de Jésus-Christ après la Descente de Croix et avant sa Mise au tombeau et met donc en scène (Luc, XXIII, 49) sa Mère, les Saintes Femmes, l’apôtre Jean et souvent d’autres personnages qui avaient été auparavant présents au pied de la Croix, comme Joseph d’Arimathie, Nicodème et parfois des anges.”

Déploration du Christ, œuvre en terre cuite de Guido Mazzoni (vers 1477-1479), église de San Giovanni Battista, Modène

Les personnages bibliques représentés dans les scènes de Déploration sont presque toujours reconnaissables. En plus du Christ mort, toujours au premier plan, leur nombre varie le plus souvent entre 3 et 7. Aux pieds et à la tête du Christ, tenant le linceul : deux hommes. Il s’agit de Joseph d’Arimathie et de Nicodème qui, d’après Jean, ont pris en charge la dépouille de Jésus pour l’ensevelissement (Jean 19, 38-42).

La femme qui se penche sur le corps de Jésus n’est autre que Marie, sa mère, qui, d’après Jean, était présente lors de la Passion (Jean 19, 25-27). À sa droite (à gauche sur la sculpture), ou derrière elle, un jeune homme la soutient : c’est le disciple bien-aimé – l’Apôtre Jean selon la tradition – à qui Jésus agonisant a confié sa mère (Jean 19, 25-27).

Marie-Madeleine, confondue ou associée à la pécheresse repentante anonyme mentionnée chez Luc (Luc 7, 36-50), est le plus souvent représentée en pleurs par référence à Luc 7, 38 :

Et se plaçant par derrière, à ses pieds [de Jésus], tout en pleurs, elle se mit à lui arroser les pieds de ses larmes ”.

Les deux autres femmes sont Marie de Clopas, mentionnée par Jean (Jean 19, 25), et Salomé – dite “Marie Salomé” – mentionnée par Marc (Marc 15, 40 ; 16, 1).

Déploration du Christ à quatre personnages (Jésus, Marie, Jean et la Madeleine en pleurs) : église Saint-Jean au Marché de Troyes (1515-1530)

Déploration du Christ à huit personnages : église Saint-Nizier de Troyes (vers 1530)

Déploration du Christ à huit personnages (avec la Madeleine en pleurs) : Église Saint-Pierre de Carennac (Lot), fin 15e siècle

Déploration du Christ, Basilique Saint Rémi de Reims

Déploration du Christ (Madeleine et Jean en pleurs) : Basilique Saint Rémi de Reims (détails)

La Madeleine en pleurs de la Déploration du Christ de la Basilique Saint Rémi de Reims est particulièrement expressive comme on peut le voir sur les photographies ci-dessus. Et son ventre arrondi paraît bien indiquer qu’elle – ou du moins son modèle – est enceinte. Certes. Mais notre sculpteur de la fin du XVe, ou plus vraisemblablement du XVIe ou XVIIe siècle, a-t-il réellement voulu signifier que la Marie-Madeleine dont parlent les évangiles était enceinte de Jésus comme le prétendent certaines personnes aujourd’hui ? Une œuvre d’art, comme toute production quelle qu’elle soit, ne doit pas être déconnectée de son contexte historique. Si, aujourd’hui, depuis la parution du Da Vinci Code, nombreuses sont les personnes qui sont convaincues que Jésus et la Magdaléenne étaient mariés et ont eu des enfants (quand elles ne sont pas également persuadées elles-mêmes de compter parmi leurs descendants…), quelles étaient donc les idées en vogue concernant la Madeleine à l’époque de la réalisation de cette sculpture ?

Nous l’avons déjà dit, en partie. La Madeleine était couramment confondue avec la pécheresse anonyme mentionnée par Luc, une femme dont les évangiles ne précisent pas la nature des fautes mais que l’on a eu tôt fait de qualifier de péchés sexuels. En outre, la Magdaléenne était également fréquemment confondue avec la femme surprise en adultère mentionnée par Jean et à qui Jésus aurait permis d’échapper à la lapidation (Jean 8, 1-11). C’est cette double confusion qui a conduit certains artistes à représenter la Madeleine enceinte pour afficher de façon bien visible dans son corps la nature et la conséquence de sa faute supposée. Ce sont ces représentations, assez nombreuses, qui permettaient ainsi aux fidèles de l’identifier facilement, qui, des siècles plus tard, sont interprétées à la fausse lueur d’un roman à succès totalement déconnecté des réalités historiques. Des représentations que certains, aujourd’hui, semblent s’étonner de découvrir alors qu’elles ont toujours été visibles de tous et, qu’en leur temps, elles n’étonnaient évidemment personne….

 

Thierry Murcia, PhD,

Octobre 2021

Centre Paul-Albert Février (TDMAM-UMR 7297 / Aix-Marseille Université – CNRS)

Jésus et la femme adultère, Cranach l’Ancien (1535-1540)

Article consultable et téléchargeable gratuitement sur Academia

Lien ci-dessous

Voir également :

Marie-Madeleine enceinte de Jésus ? (1er volet)

Marie-Madeleine ou Marie l’Égyptienne ?

Marie-Madeleine enceinte de Jésus ? (2e volet)

La Vierge Marie, la femme de l’Apocalypse et la femme adultère

Marie-Madeleine enceinte de Jésus ? (3e volet)

Gravide ou opulente ?

Marie-Madeleine enceinte de Jésus ? (4e volet)

Pourquoi Marie-Madeleine est-elle parfois représentée enceinte (1/2) :

1) Marie-Madeleine et Jean-Baptiste

Marie-Madeleine enceinte de Jésus ? (5e volet)

Pourquoi Marie-Madeleine est-elle parfois représentée enceinte (2/2) :

2) Enceinte car pécheresse présumée

Marie-Madeleine enceinte dans le Livre d’heures de Catherine de Clèves (c. 1440)

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